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Vous êtes ici : Accueil > Technique > Mémoires > Impression jet d'encre grande vitesse pour le secteur du livre. Quel avenir ? | Révision : 29 avril 2011 |
Impression jet d'encre grande vitesse pour le secteur du livre. Quel avenir ? |
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Pierre STERLING et Oriol CUSOLA Élèves ingénieurs 2e
Année
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Voir aussi : | ||
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Figure 1 - Impression jet d'encre grande vitesse de livres |
L’impression des livres est traditionnellement réalisée en utilisant le procédé offset. Ce dernier offre les avantages suivants : grande vitesse de production, bonne qualité d’image et faibles coûts pour les grands tirages. Cependant, quand il s'agit de produire des faibles quantités d’exemplaires, ces avantages ne sont plus aussi évidents. L'offset requiert des temps de mise en œuvre amortis seulement pour les longs tirages : c’est pourquoi les éditeurs doivent demander un minimum de copies à l’imprimerie afin qu’elle puisse accepter le travail. Cela se traduit par une augmentation des stocks chez les éditeurs ou une perte d'argent pour l'imprimerie lorsqu’elle ne peut pas refuser le travail, par exemple, lorsque le donneur d’ordre est un bon client. Éditeurs de presse, imprimeurs de livres et autres imprimeurs traditionnels sont quotidiennement aux prises avec l'augmentation des coûts et les fluctuations du marché.
En réponse à cette situation, l'impression numérique apporte une nouvelle dimension à la productivité dans la fabrication de livres et de journaux. Jusqu’à présent, utiliser des systèmes numériques pour imprimer des livres n’était pas envisagé car les machines ne pouvaient pas atteindre des vitesses élevées de production et n'étaient pas suffisamment compétitives pour s'adapter à l'évolution rapide et massive de la demande.
Aujourd'hui, une nouvelle génération de presses numériques voit le jour et crée une brèche dans le marché du livre en se positionnant comme une alternative viable pour les faibles tirages et les changements brusques de la demande. Il est désormais possible d'imprimer un nombre plus important de livres avec des délais de production réduits et avec une gâche elle aussi en nette baisse.
Les rotatives offset traditionnelles peuvent atteindre des vitesses de 700 à 800 m/min et les presses à feuilles, 14 000 feuilles/h. Avec des vitesses de 150 m/min, les presses numériques jet d’encre actuelles changent la donne et apparaissent comme de sérieuses concurrentes.
Traditionnellement, les éditeurs font imprimer des livres en longs tirages afin de réduire les coûts unitaires et des stocks sont nécessaires pour satisfaire la demande prévue et future. Il en résulte une hausse du nombre d'impressions, de coûts administratifs et de retours ainsi que l'encombrement des entrepôts remplis de palettes de livres invendus. L'impression numérique vient transformer la chaîne d'approvisionnement en permettant les courts tirages de livres et de répondre à des demandes ponctuelles.
Il y a peu d’information sur les systèmes d'impression jet d'encre appliquée aux livres avant 2006. Cela peut s’expliquer par le besoin récent de répondre aux attentes des consommateurs qui, dès 2005/2006, commencent à bouder le matériau papier. Il fallait donc trouver le moyen de produire à moindres coûts les différents imprimés et a fortiori les livres. En d’autres termes, il fallait faire correspondre l’offre à la demande en diminuant les stocks : problème en partie résolu grâce à l’arrivée de l’impression jet d’encre grande vitesse, dévoilée en 2008 au grand public lors du salon international Drupa.
Plusieurs procédés d'impression peuvent être comparés lors de la prise de décision pour l’impression des livres : l'offset, la flexographie, l'héliogravure et l'impression numérique (électrophotographie et jet d’encre) [Tableau 1].
Procédés | Avantages | Inconvénients |
Offset |
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Flexographie |
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Héliogravure |
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Impression numérique |
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Tableau 1 - Tableau comparatif des procédés d'impression pour l'impression de livres
Examinons de façon synthétique les principes de fonctionnement des systèmes d'impression numérique : l'électrophotographie et le jet d'encre.
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Figure 2 - Composants d'une imprimante
laser [PiloShop : How does Laser Printers Work] |
Figure 3 - Fonctionnement du procédé électrophotographique [Wikipedia : xerography] |
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Le cylindre d'impression est recouvert d'un polymère photoconducteur spécial initialement chargé en électricité statique par un dispositif haute tension (corotron, scorotron ou corona). Ce photoconducteur est exposé à une lumière laser pour former l'image à imprimer. Les parties exposées à la lumière se déchargent. Déposée sur le cylindre d'impression, l'encre – soit sous forme de poudre (toner) soit liquide – est attirée sur les parties chargées et repoussée par les autres. L'encre liquide donne une meilleure qualité d'impression car elle permet de transférer plus de particules pour une même masse.
Ensuite, l'encre est transférée, soit directement soit via un blanchet, sur le support d'impression chargé en électricité statique. Sur certains modèles, le four est enduit d'une fine couche d'huile de silicone, chauffé et pressé afin de fixer définitivement l'encre par polymérisation (encre liquide) ou par fusion (toner). En fin de cycle, le cylindre d'impression est débarrassé des résidus d'encre et rechargé en électricité pour démarrer le cycle d'impression suivant.
C'est un système d'impression sans contact de type direct dans lequel de minuscules gouttelettes d'encre sont propulsées par une petite ouverture, la buse, d'une tête à une position bien définie sur le support d'impression afin de créer une image [Figure 4]. Il existe actuellement deux méthodes d'impression : le jet d'encre continu et le jet d’encre à la demande.
Le jet d'encre continu (continuous inkjet (CIJ)) : des gouttes d'encre, chargées ou non, régulières en volume et en fréquence, sont générées et orientées selon le motif à créer. Si les gouttes chargées ne sont pas désirées sur le support, elles sont déviées par un champ électrostatique et récupérées dans une gouttière. Elles réalimentent la tête d'impression. La qualité est moindre qu'avec le procédé de goutte à la demande mais les cadences sont bien plus élevées. Pour accélérer le processus, la tête d'impression ne se contente pas d'imprimer une seule ligne de pixels à chaque passage, mais également une ligne verticale de pixels à un moment correspondant au nombre d'ouvertures dans la tête. L'encre provient d'une cartouche remplaçable.
Le procédé de goutte à la demande (drop on demand (DOD)) est de loin le plus développé. La goutte est générée à chaque fois qu'elle est désirée. C'est la technologie la plus courante en bureautique (small office-home office (SOHO)) et elle permet d'obtenir une bonne qualité d'impression. Elle est cependant plus lente, c’est pourquoi elle n'est pas développée dans le cadre de cette étude.
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Figure 4 - Schéma détaillant l'éjection
de l'encre pour une tête d'impression [Timis] |
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Les paramètres sur lesquels se joue le développement de l'impression jet d'encre des livres sont les suivants :
La vitesse et l'amélioration des prix dans ce segment ont abouti à un modèle économique solide pour produire de 2000 à 100 000 livres. Qu'il s'agisse d'imprimer une série de 30 livres différents avec 1000 copies par livre ou un seul livres à 30 000 exemplaires, le coût unitaire demeure sensiblement le même pour une imprimante numérique. En revanche, avec une presse offset, la production des plaques, le temps de calage, la mise au point, etc. sont des facteurs ne permettant pas cette souplesse et le prix unitaire s'élève lors des courts tirages.
Le tableau ci-dessous indique quelques solutions d'impression numérique de livres (liste non exhaustive) :
Marque / Société | Technologie | Prix | Vitesse | Laize | Grammage | Description |
Espresso Book Machine (EBM) [Vidéo 1] |
Xerox 4112™ | 68 000 € | Un livre en quelques minutes |
975 mm | 40-200 g/m² | Avec systèmes de finition pour obtenir un livre complètement fini. |
Xerox | Xerox 4112/4127™ EPS | 110 ppm-125 ppm | 480 mm | 45-300 g/m² | Grande vitesse d’impression, 2400 lpi. | |
Océ | Océ JetStream 2800 | 130 m/min | 749 mm | 64-157 g/m² | Performances pour l'impression de livres et de journaux. 600 lpi. | |
Kodak | Kodak Prosper 5000XL Press | 200 m/min | 622 mm | 45-300 g/m² | La qualité d'image approche 175 lpi. | |
Kodak | Kodak Versamark DH90 | 152 m/min | 1524 mm | Carton ondulé | La qualité d'image approche 1200 lpi. | |
Hewlett-Packard | HP T200 Color Inkjet Web Press | 120 m/min | 520 mm | 20-250 g/m² | La qualité d'image approche 1200 lpi. | |
Hewlett-Packard | HP Indigo Press 5000 | 266 ppm | 630 mm | 55-130 g/m² | La qualité d'image approche 812 lpi. |
Tableau 2 - Quelques solutions d'impression jet d'encre de livres
Vidéo 1 - Expresso Book Machine [YouTube] |
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En matière de développement durable, l'impact de l'impression jet d'encre de livres dépend de la capacité de l’industrie de récupération papetière à perfectionner le désencrage des papiers. L’encre pour jet d’encre est à base de solvants ou à base d'eau, contrairement à l'encre offset qui est une encre grasse. En règle générale, le désencrage est réalisé dans des cellules de flottation qui utilisent l'eau comme moyen de séparation. L’immiscibilité de l’encre offset dans l'eau favorise le désencrage. En revanche, la nature de l'encre pour jet d'encre est proche de celle de l’eau et la séparation de la phase papier et de la phase encre est plus difficile.
Par ailleurs, une imprimante jet d'encre consomme moins d'énergie qu'une presse offset : en effet, déplacer la tête d’impression et éjecter l'encre dans un système numérique nécessite moins d'énergie que faire tourner l'ensemble des cylindres d'une machine offset.
Avec l’impression jet d’encre, de nombreux consommables disparaissent (plaques, films, poudre antimaculante, blanchets,...), ainsi que des produits chimiques (alcool ispopropylique, solvants de nettoyage).
À tous ces éléments, il faut ajouter les choix que fait l’imprimeur afin de réduire l'impact de ses travaux sur l'environnement :
Des certifications, labels et normes donnent aux entreprises des moyens d'évaluer et de diminuer leur impact environnemental. De plus, l’Union Nationale de l’Imprimerie et de la Communication (UNIC) promeut la marque Imprim’Vert® visant à améliorer le comportement au quotidien des imprimeurs.
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Figure 5 - Chaîne de valeur du secteur de la production de livres | ||
Le livre passe entre les mains de l'éditeur, de l'imprimeur, du brocheur-relieur, du distributeur, du libraire, du bibliothécaire voire du bouquiniste. L'impression se situe au milieu de cette chaîne de valeur du secteur de la production du livre. Ses différentes étapes sont en grande partie identiques que le livre soit produit via l'impression offset ou via l'impression numérique. Dans le processus, l'étape qui varie est le système d'impression.
Lorsqu'un auteur décide de faire publier son œuvre, il la fait enregistrer, lui-même ou par un agent littéraire, auprès d'une société d'auteurs. Il détient alors un droit exclusif de publication (copyright (©)). Il adresse ensuite son manuscrit (ou tapuscrit s'il est dactylographié) à un ou plusieurs éditeurs. Si son livre se vend, l'auteur perçoit entre 10 et 12 % du prix hors taxes des livres réellement vendus (à l'exclusion des exemplaires offerts, du service de presse, des invendus, des livres abîmés,...). Ces droits d'auteur ne lui sont versés qu'un an après la publication. Entre-temps, l'éditeur peut lui verser un à-valoir, c'est-à-dire un acompte sur les droits.
Lorsqu'un éditeur, conseillé par un comité de lecture, accepte un manuscrit, il signe avec l'auteur un contrat d'édition qui définit le pourcentage de la vente du livre qui sera attribué à l'auteur. L'éditeur prend alors en charge la fabrication et la promotion du livre. Il confie la fabrication du livre à un imprimeur, opère des choix typographiques et décide d'un tirage c'est-à-dire du nombre de livres qui seront imprimés en une fois. C'est une prise de risque importante. En effet, en cas de gros tirage, le prix de revient de chaque exemplaire est certes plus bas mais l'éditeur doit payer les invendus à l'imprimeur. En revanche, en cas de faible tirage avec une bonne vente, l’éditeur doit commander un nouveau tirage plus coûteux et ainsi diminuer sa marge bénéficiaire. L'imprimeur appose sur le livre son numéro de dépôt légal.
Une fois imprimé, le livre est conditionné et stocké chez un diffuseur tandis qu'un distributeur l'achemine jusqu'à son lieu de vente : librairie ou grande surface. Le livre étant une marchandise, l'éditeur s'occupe de sa promotion : publicité, dédicaces, salons, participation aux prix littéraires. Une partie de la production ne procure aucun bénéfice : exemplaires distribués gratuitement aux journalistes et aux critiques, livres abîmés, invendus. L'éditeur attribue un numéro ISBN (International Standard Book Number) à chaque œuvre.
Le livre est acheminé vers les lecteurs via divers canaux. Le libraire vend les livres neufs qu'il a en stock et commande des ouvrages avec des références complètes. Le livre peut aussi être acheté sur Internet ou par adhésion à un club de lecture. Les bibliothèques disposent de vastes fonds et prêtent les livres au public.
Le prix public d’un livre est réparti comme suit entre les différents acteurs de la chaîne du livre :
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Figure 6 - Répartition du coût d'un livre
entre les acteurs de la chaîne du livre [SNE] |
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Avec un prix moyen évalué par l'Institut GfK à 10,90 euros tous formats confondus, le livre reste le moins cher des produits de loisirs (jeu vidéo, DVD, CD).
La crise n'a pas affaibli voire a dopé le marché du livre. Les éditeurs ont d'ailleurs saisi une belle opportunité en publiant une batterie d’ouvrages sur la crise ou sur la consommation à petits prix !
Le contexte actuel est marqué par la croissance du chiffre d'affaires de l’édition de livres, la stagnation de la presse et la diminution de l’imprimerie de labeur.
En France, en matière d'impression de livres, le tirage moyen affiche une tendance à la baisse depuis quelques années alors que le nombre de titres publiés et d’exemplaires imprimés augmente [Figure 6]. Cela peut signifier que les livres ne sont pas imprimés en France. Il y a donc une place potentielle sur ce marché que pourrait occuper l'impression jet d'encre de livres.
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Figure 6 - Indice d'évolution des titres,
des exemplaires et du tirage moyen (données 2009) [Ministère de la Culture et de la Communication - DEPS : Chiffres clés 2011 : livre] |
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Unis pour contrer la déferlante numérique, les auteurs, les éditeurs et les pouvoirs publics se sont entendus pour finaliser un accord lors du Conseil du Livre du 22 mars 2010 prévoyant notamment "un modèle de diffusion et d’exploitation commerciale des œuvres numérisées avec une répartition des revenus à définir". L’objectif de créer "une véritable offre numérique alternative à Google Livres" apparaît comme une occasion d'imprimer des livres à la demande en utilisant l'impression numérique.
Un livre numérique coûte-t-il moins cher ou plus cher à produire qu'un livre classique ? Le sujet suscite la controverse. Néanmoins, une étude réalisée en 2010 sur le coût d'un livre numérique conclut que "la numérisation engage l’avenir des éditeurs du point de vue de leur distribution numérique comme de leur distribution papier avec des solutions de tirages de plus en plus courts", une opportunité là encore de faire intervenir l'impression jet d'encre des livres.
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Cliquer
sur l'image pour l'agrandir Figure 7 - Analyse concurrentielle du marché de l'impression jet d'encre grande vitesse de livres via le diagramme de Porter |
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Le système de base est l’impression de livres en général dans lequel le jet d’encre grande vitesse joue le rôle de nouvel entrant. Les plateformes et liseuses numériques apparaissent comme des substituts possibles au livre imprimé. Dans le rôle des utilisateurs de l'impression numérique, il y a bien sûr les imprimeurs de livres. Toutefois, il faut également y ajouter les petites entreprises possédant une imprimante jet d'encre qui pourraient être amenées à produire – à petite échelle et en possédant les droits correspondants – des livres à la demande.
Les perspectives de développement technologique du procédé jet d’encre grande vitesse sont prometteuses. Un effort de réduction du coût de l'impression permettrait de diminuer fortement le coût unitaire de production d’un imprimé.
Les constructeurs de presses numériques jet d’encre lancent de nouvelles machines sur le marché, toutes plus compétitives les unes que les autres. À titre d'exemples, citons les presses à jet d'encre continu dévoilées lors du salon Ipex 2010 par Xerox, d'une vitesse d'impression de 152 m/min, ou encore par HP (T200). Notons que d'autres fabricants tels que Ricoh InfoPrint Solutions, Océ ou encore Kodak se positionnent également sur le marché.
Sur le plan technologique, les constructeurs sont prêts à répondre à la demande en termes de vitesse d’impression et de flexibilité de gestion. De plus, la stimulation est d’autant plus grande que des recherches sont menées en permanence sur les procédés conventionnels d’impression de livres, notamment l'offset.
Ces dix dernières années, les chiffres du secteur de l’édition de livres connaissent une croissance constante contrairement au domaine de la presse où les chiffres sont stables et à l'imprimerie de labeur où ils chutent. Cette évolution encourageante du secteur du livre permet aux imprimeurs de parier sur l’avenir et d’effectuer les investissements nécessaires pour répondre aux nouvelles attentes.
Vigilants quant aux facteurs influençant leurs chiffres d’affaires, les éditeurs se préoccupent du contrôle des coûts et des retours. Ces paramètres dépendent essentiellement des choix effectués par les imprimeurs. C'est pourquoi, en fonction du nombre d’exemplaires commandés par les éditeurs et des délais de livraison, les imprimeurs doivent être en mesure de faire le meilleur choix : procédé conventionnel ou jet d’encre.
Par ailleurs, le développement de la diffusion sur des supports multimédia occupe une place croissante dans les priorités des éditeurs désireux de s'adapter aux attentes de la clientèle.
Enfin, le déclin de la lecture des documents imprimés et l'essor des supports de lecture numérique sont des tendances que les éditeurs et les imprimeurs doivent prendre en considération afin de les contrer ou, mieux encore, de les utiliser afin de diversifier leur offre de produits.
Dans le procédé jet d’encre, les temps de calage sont quasi-inexistants, ce qui implique beaucoup moins de gâche papier. La consommation d’encre s'en trouve diminuée, à condition de bien contrôler l’épaisseur de la couche d’encre déposée. En revanche, il s'avère que le désencrage est plus difficile que dans les procédés conventionnels. En effet, le papier utilisé lors d'une impression jet d'encre est plus poreux, s'agissant d’un procédé sans contact où il n’y pas de pression exercée sur le support pour faire adhérer et pénétrer l’encre.
Concernant l’expédition des imprimés, l'objectif en utilisant le jet d'encre est de répondre plus rapidement aux commandes des clients, sous forme de flux tendus. Cela limite les invendus donc les retours. L’implantation de machines jet d’encre grande vitesse dans des d’imprimeries de proximité permet des trajets moins longs ou pouvant être couplés avec le transport d’autres biens commerciaux. Cette meilleure gestion des stocks et des expéditions permet de réduire la consommation de carburants.
Enfin, ajoutons que la formulation des encres utilisées dans le procédé jet d’encre connaît de fortes mutations. Son temps de séchage tend à diminuer pour accélérer les cadences et sa composition est de plus en plus respectueuse de l’environnement car les volumes de production augmentent et d’importantes recherches sur le désencrage sont en cours.
Forces | Faiblesses |
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Opportunités | Menaces |
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Tableau 3 - Analyse stratégique via la matrice SWOT du marché de l'impression jet d'encre grande vitesse de livres
Nous avons choisi de nous intéresser à la démarche stratégique adoptée par le groupe CPI, premier imprimeur de livres en Europe, disposant de plusieurs sites de production répartis en France, Grande-Bretagne, Pays-Bas, Allemagne et République Tchèque. Le groupe CPI est l’un des premiers imprimeurs à faire le choix de l'impression numérique de livres. Il s’appuie sur ses fortes capacités d’investissement afin de prendre des risques et de ne jamais se faire surprendre par la concurrence. Sa stratégie de production de masse vise à réduire le coût unitaire des produits afin d'en vendre beaucoup. De fait, CPI n'est pas dans une production à forte valeur ajoutée.
Les choix du groupe CPI en matière d’impression numérique correspondent à une volonté de diversification de sa production. Face à la baisse des commandes à gros volumes, l'entreprise s’adapte rapidement et, sur le site Firmin-Didot, elle inaugure en mars 2010 sa nouvelle ligne de fabrication de livres Quantum comportant une rotative jet d’encre HP T300 monochrome, un système de coupe et de façonnage FlexBook de Magnum et une ligne de brochage Acoro de Müller-Martini [Vidéo 2]. Ce plan de développement se poursuit avec l'installation de lignes de production du même type à l'imprimerie Bussières, aux Pays-Bas chez Koninklijke Wöhrmann et en Angleterre sur le site de Chippendam.
Vidéo 2 - Ligne de fabrication de livres
par jet d'encre Quantum de CPI [YouTube] |
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CPI ne néglige pas pour autant ses lignes de fabrication traditionnelles : l'entreprise investit dans la rotative offset Commander CT de KBA [Vidéo 3]. Un choix guidé par la volonté de rester leader sur un marché du livre en pleine mutation comme l'explique le président du directoire du groupe CPI, Pierre-François Catté : "En tant que leader européen, nous avons un devoir d'innovation vis-à-vis de nos clients. Avec cet investissement, nous prenons une longueur d'avance en optant pour une rotative très spécifique, à la productivité très élevée, qui renforcera encore notre avantage concurrentiel". En effet, grâce aux rotatives offset et aux presses jet d’encre grande vitesse, CPI veut être capable de répondre aussi bien à des commandes de plus d'un million d’exemplaires qu'à celles de l’ordre du millier d’exemplaires.
Vidéo 3 - Rotative offset Commander CT de
KBA [YouTube] |
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Recentré sur ses activités, le groupe CPI se sépare des imprimeries Herissey et France Quercy qui ne correspondent plus à ses objectifs. En revanche, il acquiert l’imprimerie allemande buch bücher.de spécialisée dans la fabrication de livres en courts tirages, illustrant ainsi la conformité de ses choix à une politique d’entreprise déterminée et à une expansion stratégiquement planifiée, en s’aidant en continu des indicateurs de performance mis en place.
Imaginons des scénarios de développement du marché de l'impression jet d'encre de livres en nous fondant sur des éléments présents et futurs, et qualifions ces hypothèses d'un taux de probabilité.
Les habitudes de lecture ont changé. Les modes de commercialisation et d'achat des livres également. Les librairies classiques évoluent afin de se positionner comme des distributeurs dotés d'une véritable puissance commerciale. Les ventes de livres dans les librairies, dans les supermarchés comme sur Internet témoignent de la diversité de la diffusion. Cette évolution donne naissance à une nouvelle chaîne du livre à valeur ajoutée. Des plateformes de téléchargement impriment désormais elles-mêmes les livres et les écrivains publient de plus en plus à compte d'auteur afin de vendre directement leurs œuvres au public. En résumé, le marché du livre devient plus volatil, ponctuel et imprévisible.
Dans ce scénario, la valeur intrinsèque du livre est en régression. L'orientation est claire mais elle place les éditeurs de livres dans une position difficile. Le matériau papier est délaissé : il souffre d'une image vieillotte et d'une mauvaise réputation quant à son impact environnemental ; de plus, l’accès à l’information n’est pas immédiat. L’e-Book, liseur de livres numériques, se développe mais il est confronté à des problèmes de droits d’auteur et aussi d'impact environnemental, le bilan écologique de son utilisation sur une période de trois ans n’étant pas positif par rapport au papier.
De plus en plus de livres doivent être imprimés lorsqu'ils sont au cœur de l'actualité. Dès lors, il devient difficile pour les éditeurs de prédire les quantités qui seront vendues et le risque de mise au pilon du stock invendable est plus présent que jamais. Les éditeurs prennent en compte le pourcentage en constante diminution des volumes de production des livres dans le monde entier. Leur part de marché a déjà chuté en dessous de 40 %. Il y a un nombre croissant de livres produits et commercialisés par des tiers utilisant des méthodes non traditionnelles. C'est précisément là qu'intervient l'impression numérique qui jette une passerelle pour associer rentabilité et temps de réponse extrêmement rapides.
L’engouement du consommateur pour le livre traditionnel ne chute pas, bien au contraire. Pour autant, la demande est ciblée et l’impression jet d’encre, avec ses innovations technologiques et son implantation solide dans les imprimeries, permet de répondre aux attentes de la clientèle. Les procédés conventionnels tels que l’offset n’offrent plus une flexibilité suffisante, la chaîne de valeur du livre est remise en cause.
L'objectif des imprimeurs est de répondre aux attentes des consommateurs dont ils sont tributaires. L’ancrage culturel du matériau papier restant fort dans notre société, l’arrivée des liseurs de livres numériques sur le marché n'a finalement qu’un impact minime sur les ventes globales de livres (estimation : 5%). De plus, les besoins de longs tirages de livres pour les éditeurs demeurent. Les procédés d'impression conventionnels ainsi que le jet d'encre grande vitesse sont amenés à progresser et à offrir des coûts de revient plus intéressants. Par ailleurs, la tendance à l’augmentation de tirages courts, avec des délais de livraison raccourcis, est une aubaine pour la technologie jet d’encre grande vitesse, très compétitive pour des tirages inférieurs à 3000 exemplaires.
Aux États-Unis, le succès des tablettes Kindle d’Amazon et E-Reader de Sony est incontestable. En janvier 2010, 2,5 à 3 millions de liseuses Kindle ont déjà été vendues outre-Atlantique où Amazon détient 60% du marché. Le livre numérique pourrait occuper 10 à 15% du marché d’ici cinq à sept ans. En France, il ressort d'un sondage réalisé début 2010 par l’institut OpinionWay pour le journal Le Figaro que "si le plaisir de feuilleter des pages ne disparaîtra pas, 22 % des personnes interrogées s'imaginent à l'avenir lire un roman ou un essai sur ordinateur ou sur un e-book". Un constat à tempérer car "il existe une large majorité rétive à toute idée de lire via un écran quel qu'il soit : 77% des Français s'imaginent dans les années à venir continuer à feuilleter encore des pages et des pages".
Certains éditeurs français craignent de subir l'"effet iTunes" en référence à la plateforme de téléchargement de musique d’Apple qui a réussi à imposer la chanson à prix cassé. Dans son étude "Maisons d’édition : les défis à relever pour 2010", le cabinet d'études KPMG estime qu’il est encore trop tôt pour déterminer le rythme de déploiement du livre numérique en France et les incidences financières sur la chaîne de valeur du livre. KPMG s’est prêté à l’exercice de transposer la décomposition du prix d’un ouvrage papier à une version numérique, en prenant en compte l’application du taux normal de TVA de 19,6% et une baisse supposée de 25% du prix de vente d’un ouvrage numérique. Il en conclut que "l’intégration du numérique dans la chaîne éditoriale entraînera une modification de la rémunération des différents acteurs et amènera les éditeurs à procéder à un arbitrage afin de préserver à la fois la création éditoriale, source de leur activité, et les circuits de diffusion, sources de leur développement".
Dans le monde des industries graphiques, et en particulier dans le secteur de la production de livres (éditeurs et imprimeurs), il existe un large éventail d'opinions sur l'avenir de l'impression jet d'encre grande vitesse, en dépit du fait que cette dernière n'a pas encore eu le temps de se consolider sur le marché. Malgré tout, de grands groupes imprimeurs comme CPI ont décidé de parier sur cette technologie d'impression jet d'encre.
Le procédé numérique offre certainement de nombreux avantages par rapport à l'impression offset conventionnelle, non seulement en s’intégrant à la perfection dans la chaîne de valeur voire en la modifiant dans l’avenir, mais aussi en apportant des éléments qui contribuent à optimiser le flux de travail dans le système de production de livres.
Toutefois, comme les autres procédés, l'impression jet d'encre de livres est confrontée à la menace que représente l’émergence des livres numériques sur le marché, faisant craindre la suppression des versions papier. L'arrivée de nouveaux acteurs, tels que Google ou Amazon, et de nouveaux produits comme les tablettes numériques révolutionne le paysage de l’édition. Néanmoins, la grande diversité d'opinions parmi les experts donne un sentiment général d'incertitude quant à l'avenir du secteur du livre.
De notre point de vue, l’impression jet d’encre grande vitesse de livres est une technologie pérenne qui offre des perspectives d’évolution telles que toute l’industrie du livre pourrait connaître une véritable réorganisation à moyen terme. L’avenir du livre en version papier dépend en fait beaucoup de la manière dont les imprimeurs sauront utiliser et promouvoir cette nouvelle façon de produire des livres.
Océ color solutions show commitment to achieving color market leadership | Océ Press Release, 18 mars 2009 Consulter |
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FORD C. | Digital book production. | Digital Publishing Solutions, mai 2005 Consulter |
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LACROIX C. | Chiffres clés 2011 : livre. (Données 2009) | Ministère de la Culture et de la Communication Département des études de la prospective et des statistiques - DEPS Consulter |
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LACROIX C. | Chiffres clés 2010 : livre. (Données 2008) | Ministère de la Culture et de la Communication Département des études de la prospective et des statistiques - DEPS Consulter |
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LACROIX C. | Chiffres clés 2009 : livre. | Ministère de la Culture et de la Communication Département des études de la prospective et des statistiques - DEPS Consulter |
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Syndicat national de l'édition (SNE) | Consulter | |||
La marché du livre 2010 (données 2009). | Syndicat national de l'édition (SNE) - Dossiers et enjeux Consulter |
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Centre national du livre (CNL). | Consulter | |||
Secteur du livre : chiffres clés | Centre national du livre (CNL) - Observatoire de l’économie du livre Consulter |
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Le livre sera-t-il numérique ? | Centre national du livre (CNL) Consulter |
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GAYMARD H. | Situation du livre – Évaluation de la loi relative au prix du livre et Questions prospectives. | Centre national du livre (CNL), septembre 2009 Consulter |
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Rapport de Bruno Patino relatif au Livre numérique. | Centre national du livre (CNL) Consulter |
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GAILLARD A. | L'imprimerie Firmin Didot CPI inaugure une rotative jet d'encre HP unique au monde. | Graphiline, 23 mars 2010 Consulter |
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Le groupe CPI : produire du livre différemment. | Caractère, 29 mars 2010 Consulter |
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PAILLIEZ R. | Le groupe CPI va investir dans une nouvelle rotative offset. | France Graphique, 21 avril 2010 Consulter |
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GAILLARD A. | CPI va céder les imprimeries Herissey (27) et France Quercy (46) à Qualibris. | Graphiline, 24 avril 2010 Consulter |
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PAILLIEZ R. | CPI fait l'acquisition de buch bücher.de (Allemagne). | France Graphique, 2 juin 2010 Consulter |
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CPI poursuit son plan d’investissement en Angleterre. | Caractère, 11 avril 2011 Consulter |
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GAILLARD A. | Innovation Ipex 2010 - HP se lance dans le jet d'encre continu avec la T200. | Graphiline, 19 mai 2010 Consulter |
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HP met un turbo sur ses presses rotatives jet d’encre couleur. | Caractère, 21 mars 2011 Consulter |
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Impression : Manroland et Océ allient leurs compétences. | Caractère, 6 décembre 2010 Consulter |
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Analyse qualitative - SWOT analysis | 123@Business Consulter |
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Maisons d’édition : les défis à relever pour 2010. | KPMG Consulter |
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Livre numérique : la multiplication des tablettes est une véritable aubaine pour les éditeurs. | MaxiSciences, 10 février 2010 Consulter |
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